Conception d’un objet, d’un mobilier et d’un abri pour accompagner le pèlerin sur le Camino.
Sur le chemin, de petites interventions anonymes accompagnent le marcheur sans jamais s’imposer ; parfois, elles révèlent même le paysage. Dans ce même esprit, ce projet offre trois « cadeaux » : L’Empreinte, L’Entre Deux et L’Interstice.
L’Empreinte
Au premier regard, on croit voir une simple branche sèche ramassée au bord du chemin ; pourtant, la poignée discrètement taillée à la mesure d’une main révèle qu’il s’agit d’un véritable bâton de pèlerin, porteur d’astuces cachées prêtes à servir le marcheur.
Chaque bâton provient d’une branche tombée, séchée puis conservée presque intacte ; noisetier ou châtaignier, il garde ses nœuds, sa courbe naturelle et reçoit seulement une pointe ferrée. La poignée, sculptée et brûlée, et l’écorce soigneusement poncée masquent discrètement la jonction.
La poignée se dévisse ; une lame inox logée dans un filetage invisible surgit pour couper pain ou corde, puis disparaît d’un tour inverse. Ainsi, l’objet conserve son allure rustique, anonyme et nomade, mariant la simplicité du bois brut à une ingéniosité cachée.
L’Entre Deux
Au cœur d’une forêt française, « Entre Deux » invite le marcheur à la halte. Des poteaux de châtaignier plantés en quinconce dessinent une courbe qui partage le soleil et l’ombre. Là où l’on s’assied, s’allonge ou s’adosse, le bois est poncé ; ailleurs, l’écorce brute subsiste pour fondre l’ouvrage dans les troncs alentour.
Les montants, ligaturés par des nœuds tripodes en corde, s’ancrent dans une tranchée de pierres cachée sous le sol. Des rondins verticaux affleurent et créent un tapis stable ; à terme, herbes et mousses pousseront entre les interstices, recouvrant peu à peu le bois brut et ancrant la structure dans le paysage.
Cet abri sans signature devient ainsi un lieu de halte simple et robuste : il accueille le marcheur, se fond peu à peu dans la végétation et prouve qu’un geste subtil peut concilier confort et nature.
L’Interstice
Sur le haut plateau brûlant de la Meseta, où l’ombre se fait rare et le vent soulève la poussière, se tient une structure de chaume. Sa hauteur en fait un signal visible de loin au-dessus des cultures. Une fente verticale, plus étroite qu’une porte, attire le marcheur épuisé et l’invite à franchir un seuil frais.
Il tourne les épaules pour s’y glisser ; aussitôt, les parois épaisses coupent la chaleur et le hamac de cordes laisse passer l’air sous le dos. La lumière filtrée par la paille et des tiges de blé suspendues enveloppe l’espace. Une seconde fente cadre un fragment d’horizon et invite à la contemplation.
Scellés dans des trous comblés de pierres, quatre poteaux élèvent une charpente coiffée de chaume. Un voile tendu au plafond retient les épis et tamise la lumière. Résistante au vent, la structure se fond peu à peu dans l’herbe montante. Don silencieux, « L’Interstice » offre ombre et repos au pèlerin.
Façonnés des matières du chemin, ces trois présents anonymes marchent aux côtés du pèlerin : soutenant son pas, offrant ombre et repos, ouvrant le regard. Il repart, léger, et d’autres pèlerins les découvriront à leur tour… avant de trouver, plus loin, d’autres surprises faites pour eux.