la fin de vie, construire pour l’après

LA DÉAMBULATION

Dans les centres de soins palliatifs, une grande majorité des résidents se retrouvent alités et par conséquent immobiles ; l’action banale de déambuler leur est souvent inaccessible. Le pari de ce projet est de proposer d’intégrer le mouvement dans la vie des résidents, afin d’offrir une alternative à l’arrêt qu’évoque la fin de vie. Le lit médicalisé est habillé d’une structure en bois chaleureuse. Tel un navire, il a vocation à parcourir l’entièreté du centre et de son jardin aménagé.

L’ENTREE

Lors de son arrivée, le futur résident est reçu par le personnel au travers d’un parcours inhabituel. En effet, il n’y a pas de borne d’accueil, l’entrée joue avec les limites entre l’intérieur et l’extérieur grâce notamment à son plafond vitré, créant une sensation d’ouverture et d’espace infini. Les repères réconfortants du quotidien permettent de se sentir accueilli ; les fenêtres asymétriques et les grands murs de pierre rappellent l’aspect familier d’un village, ajoutant une touche de chaleur et d’authenticité. Chaque détail est conçu pour éviter la sensation d’enfermement, transformant cet espace en un sas de transition vers le jardin d’hiver, où l’exploration et la découverte se poursuivent.

LE JARDIN D’HIVER

Dans le jardin d’hiver, les limites entre l’intérieur et l’extérieur restent subtiles, créant une atmosphère propice à la détente. On peut y patienter en toute tranquillité pendant que les accompagnateurs règlent les détails administratifs dans le bureau adjacent.

Le système de trame au plafond est ingénieusement conçu pour réduire l’impact du soleil, tandis que les fenêtres s’ouvrent pour faire circuler l’air, maintenant une température idéale.

LA CHAMBRE

De l’entrée de la chambre jusqu’au jardin, il n’y a qu’un pas. La lumière traverse la pièce grâce aux larges baies vitrées. Le lit au centre, libre de tous ses mouvements, invite à la promenade. L’évocation du jardin d’hiver par la trame de bois réconforte les résidents par son aspect familier.

LE CABINET DE CURIOSITES

Cet espace constitue la particularité essentielle de ce centre : la possibilité pour les résidents d’être accompagnés pour y laisser un héritage sonore. Le son, support dématérialisé, permet d’accumuler la mémoire des nombreux résidents sans aucune limite. C’est aussi un moyen de garder des souvenirs authentiques et précieux que le temps ne tarira pas. La voix reste éternellement vivante à la différence des images et des objets. Le centre de soins palliatifs met à disposition pour ses patients des personnes formées ; celles-ci les aident à converser et à réfléchir afin de créer leur héritage immatériel pour l’« après ». De par son ouverture vers l’extérieur et sa large hauteur de plafond, le cabinet des curiosités appelle à la confidence. Dans ce lieu sont disposées des étagères remplies d’objets divers qui peuvent stimuler et raviver la mémoire.

KIOSQUE

Le kiosque est le sanctuaire qui permet à la mémoire d’être partagée. En effet, une fois la conversation enregistrée dans le cabinet de curiosité, celle-ci est mise en forme et transmise par le biais d’une application aux quatre kiosques du lieu : deux dans le jardin, accessibles aux résidents et deux sur le chemin de promenade, accessibles aux proches et aux passants. Cet écrin secret et discret reste à découvrir : sur la structure se trouve un QR code qui amène à une application permettant de choisir un des héritages pré-enregistrés ; pour l’entendre, il faut s’asseoir sur le banc où les hauts parleurs directifs attendent le visiteur pour lui confier une mémoire. Le sanctuaire évoque l’immatérialité de la personne partie. Sa structure en bois fait référence à la présence du disparu, comme un cocon recouvrant l’auditeur sans nécessairement le protéger de l’environnement. A l’image d’une boite à souvenir, cette structure a pour vocation d’être attaquée par le temps, protégeant le trésor qu’il renferme et qui, lui, reste intemporel. Cet endroit invite à la contemplation du lac, il permet de rattacher la voix à un beau paysage.

Camille De Crane D'Heysselaer