Marie-Paule Le Guen, était la dernière gardienne de la maison-phare de Pontusval. Prenant la suite d’une autre gardienne, de 1968 à 2003 elle a monté les 50 marches du phare tous les jours pour veiller au bon fonctionnement de la lanterne. Elle a toujours voulu y rester, même après sa retraite et malgré les tempêtes.
le site
A force de regarder et de dessiner les rochers j’y voyait des objets, des assises, des marches, des murs, des refuges. Différentes postures : assis, debout, en équilibre, recroquevillé. Ces granites solides qui n’ont pas l’air de bouger d’un poil, mettent le corps en mouvement et expriment différentes positions du corps .
J’ai essayé de retranscrire l’atmosphère du lieu en vidéo : le calme, le chant des oiseaux, le bruit de la mer et du vent parfois très puissants. A la nuit tombée, il y a une ambiance particulière, presque mystique. La lumière du phare nous appelle à rentrer, pour se mettre à l’abris.
La solitude positive
Sur les 10 gardiens du phare de Pontusval 6 étaient des femmes. Elles ont été souvent invisibilisées et il y a peu de documents témoignant de leurs places dans les phares, mais elles ont fait parties de ses marins immobiles. Les histoires de ses gardiennes ont été source d’inspiration pour mettre en lumière des solitudes féminines.
Je crée un lieu de retraite pour une solitude positive libre où chaque femme prend possession de ce temps comme elles le souhaitent.
“La solitude est à l’esprit ce que la diète est au corps, mortelle lorsqu’elle est trop longue, quoique nécessaire.”
Comme un répit cette solitude prend toute sa place à l’intérieur.
“La maison abrite la rêverie, la maison protège le rêveur, la maison nous permet de rêver en paix.”
le granite
J’ai retiré de l’observation des granites 4 principes dans mon dessin :
LE CREUX
Usé par l’eau, le rocher va se creuser
LE FENDU
L’eau s’infiltre et crée des arêtes
LE PLAT
Le rocher semble souvent poser sur le sol pour l’éternité
L’EMBOITEMENT
Les rochers entre eux créent des paysages
le projet
Au RDC on retrouve un vestibule qui fait la transition entre l’intérieur et l’extérieur, un espace de réflexion propice à l’introspection, une cuisine, un foyer qui allie cheminée, bibliothèque, refuge et un espace d’observation.
Au 1er uniquement accessible par l’escalier du phare, les pièces nécessitant plus d’intimité : la salle de bain et enfin la chambre, lieu le plus reculé de la maison. Ces deux espaces sont directement liés au phare, ils disposent de deux fenêtres de toit qui ont un point de vue sur la lanterne.
la fenêtre
Accueillir nos pensées est important dans cette solitude positive, La contemplation fait partie intégrante de l’aménagement intérieur. La fenêtre devient un espace à part entière avec un habillage différent selon les fonctions et les points de vue. La fenêtre montre le temps qui passe et nous rattache au présent.
Des espaces intimes sont dessinés pour que les différentes occupantes puissent dialoguer avec leurs pensées, qu’elles s’approprient l’espace par la multiplicité des positions proposées. La lumière naturelle est filtrée et reflétée et créée des ombres douces ou des reflets tout au long de la journée.
le foyer
Elément central de cette maison le foyer est inspiré par des granites assez imposants et enveloppants, par l’escalade de ces rochers, par le refuge qu’on peut trouver entre eux abrité du vent, et des amers (ces repères maritimes disposés sur la côte).
Ce foyer est rassurant et on y passe le plus de temps possible, on peut s’y perdre à rêver, à contempler au dehors : on y reste longtemps.
Il donne le choix au corps de différentes postures pour contempler ses pensées. On y rêve allongée, on s’y accroupie pour regarder le feu qui y crépite l’hiver, on s’y nourrit de lecture assis en tailleur, on y médite devant la fenêtre, on y lit à coté de la cheminée ou on s’y isole tout en haut.
maquettes de recherches
la lanterne
Quand on accède à l’étage le soir, il n’y a pas de lumière dans la tour du phare car cela risquerait de brouiller la signature lumineuse du phare pour les bateaux. C’est pour cela que je crée une lanterne. Elle accompagne cette transition entre le jour et la nuit.
Ce projet est aussi une piste de réflexion à ce patrimoine en désuétude, et souhaite nourrir le discours autour de la seconde vie des phares pour qu’ils ne tombent pas dans l’obscurité et que les phares nourrissent toujours nos imaginaires.